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Proscrits Niortais de 1851

De WikiNiort
Portrait de Pierre Antoine Baugier.
Portrait de Désiré Maichain.
Portrait de Joseph Maichain.
Portrait de Charles Ginestet avec sa fille (Source : Maison de Victor Hugo - Album Philippe Asplet, fol. 33).
Ancienne Hôtel de Ville, Place du Donjon (1860) Archives municipales.
Proclammation de 1851.

Article en construction 21 novembre 2022

Le coup d'état du 2 décembre 1851

La révolution de février 1848 met fin à la Monarchie de Juillet (1830-1848), le 24 février, la seconde république est proclamée.

La nouvelle constitution institue le suffrage universel.
Le 10 décembre 1848, Louis Napoléon Bonaparte (Neveu de Napoléon 1er) est élu pour 4 ans président de la république.
Cependant, pour éviter une dictature, le président est non-rééligible. De plus, toute révision de la constitution doit être votée par l'assemblée législative à la majorité des 3 quarts.
Ne parvenant pas à obtenir cette majorité et pour conserver le pouvoir, le Président organise avec succès un coup d'état le 2 décembre 1851 (1) avec le soutien de l'administration préfectorale et de l'armée.
À Niort, comme dans de nombreuses villes, l'opposition au coup d'état est faible. Le 3 décembre le maire Henri Giraud démissionne. Il est remplacé par Paul François Proust (2).
Quelques niortais prennent les armes et envahissent l'hôtel de ville. Ces contestataires sont vite dispersés par un escadron du 1er régiment de hussard réquisitionné pour maintenir l'ordre.
(1) La date du 2 décembre a été choisie symboliquement, Elle rappelle le sacre de Napoléon 1er le 2 décembre 1804 et la victoire d'Austerlitz le 2 décembre 1805.
(2) Le 14 octobre 1852, Paul François Proust, nouveau maire de Niort, accueille, sous un Arc de Triomphe érigé avenue de la Rochelle, Louis Napoléon Bonaparte...

La Commission mixte et la répression

Dans chaque département est constituée une commission mixte chargée de juger les opposants au coup d'état.

Elle se réunit à la préfecture des Deux-Sèvres à partir du 3 février 1852.
Elle est composée des 3 hiérarchies garantes de l'ordre : Louis Marie Philibert Edgard de Renouard de Sainte-Croix Préfet, Savary, Procureur de la République, le colonel Lyon, Commandant du 1er régiment de Hussards.
Les accusés n'ont pas de défenseur et les décisions de la commission sont sans appel.
À Niort, sur une liste de 334 noms, les condamnations frappent une trentaine de personnes dont 24 considérées comme des chefs.

Les différentes condamnations

Elles frappent avant tout des républicains.

  • - Certes certains, retirés de la vie politique, y échappent comme Désiré Maichain ancien commissaire de la république et député en 1848 et Antoine Baugier ancien maire de Niort.

Parmi les 24 condamnés plusieurs sont niortais.

  • - Certains sont condamnés à la déportation en Algérie comme Lucien Amy gérant du journal « L'œil du peuple » (3) de 1848 à 1851 et considéré comme membre de la société secrète « La Solidarité Républicaine ».
  • - C'est aussi le cas de Paul Guay présenté par la commission comme étant communiste et de Louis Sauzeau avoué à Niort.
Ce journal, influencé par les idées de Cabet, est considéré comme communiste. Il sera interdit après le coup d'état.
  • - François Rousseil, « un dangereux agitateur » emprisonné au donjon depuis le 3 avril 1851 est expédié à Cayenne en Guyane où il décèdera. (Voir wiki niort : Rosélia Rousseil) : « La fille d'un proscrit » (4).
Plusieurs sont internés puis placés sous surveillance.
Couverture du livre de Rosalia Rousseil.
  • - C'est le cas de l'avocat Louis Chabaudy avocat, ancien maire en 1847 et 1848, considéré comme républicain modéré.
  • - Amable Ricard (1828-1876), jeune avocat inscrit au barreau de Niort en 1851, présent à l'hôtel de ville (Voir photo) le 3 décembre, est emprisonné. Il échappe aux rigueurs du pouvoir grâce à ses relations.
  • - Clerc Lasalle (futur beau père de Ricard) est le fondateur de la « Sentinelle des Deux-Sèvres » journal d'opposition sous la Restauration. Il est député de 1831 à 1834, vice-président du tribunal de Niort de 1833 à 1853.
Enfin certains sont proscrits et expulsés de France, principalement vers l'île anglo-normande de Jersey.
(3) « L'oeil du peuple » est intitulé : « Journal des intérêts démocratiques, agricoles et sociaux ».
(4) Début du récit de Rosalia Rousseil :
« La petite ville de Niort était tout en émoi. Sur la Place du Donjon une foule énorme gesticulait et criait :
-C’est une infamie ! Il n’a rien fait. Pourquoi l’arrêter ?
-C’est un honnête homme, nous sommes en république ! On ne peut pas l’enfermer ; c’est notre chef, on en veut à notre liberté !  »

Les proscrits de Jersey

Quatre sont niortais :

  • - Amy Lucien (1810-1883) :
Avocat, gérant du journal « Lœil du Peuple » de 1848 à 1851, il en fait une tribune des idées républicaines.
Il est affilié à la société secrète « La Solidarité Républicaine ».
Après le coup d'état, il est arrêté pour avoir tenté d'entraîner les niortais à résister.
Il est condamné à la déportation en Algérie puis le 3 avril 1852, il obtient un passeport pour Jersey.
  • - Chaumier Jean-Pierre (1804-1866) :
Menuisier puis marchand de bois, juge suppléant au tribunal de commerce, il est arrêté pour avoir pris part aux événements du 3 décembre.
Caractérisé par la commission comme « très exalté de par ses opinions socialistes », il est expulsé en Belgique puis à Jerzey.
  • - Ginestet Charles (1807-1884) :
Médecin, rédacteur en chef de « L'œil du Peuple », Défenseur d'un socialisme social, il réclame une république démocratique, le droit au travail, l'impôt progressif, l'enseignement gratuit.
Le 17 janvier 1852, le préfet des Deux-Sèvres indique à son sujet : « C'est l'âme du parti révolutionnaire..., c'est lui qui a fait le plus de mal dans le département..., il mérite la punition la plus sévère ».
Le 16 février 1852, la commission décide son expulsion. Il réside à Jersey. Il est amnistié en 1859 et revient en France.
Propriétaire et avocat, en 1851 il demeure à Niort rue Neuve. Il est le frère de Désiré Maichain.
Commissaire de la République et député en 1848. Il est conseiller municipal et adjoint au maire de Niort de février à avril 1848.
Il est soupçonné d'être membre de la société secrète « La solidarité républicaine » fondée à Paris en octobre 1848 par Ledru Rollin..
Le 11 février, il est élu vice président de La Société de Secours Mutuel des ouvriers chamoiseurs de Niort.
Le 10 février 1852, la commission mixte le condamne à l'expulsion du territoire comme ayant par ses paroles venu en aide aux émeutiers.
Il se retire d'abord en Belgique puis à Jersey.
Il est gracié le 3 février 1853 et rentre en France.

Quelques autres proscrits non niortais

On ne citera cependant que quelques exemples :

  • - Grandeau Pierre garçon meunier à Saint-Maxire et de sa femme Marie Bertrand sont expulsés pour propos séditieux, le 23 février 1852, puis graciés en 1853.
  • - Fayard Jacques pharmacien à Champdeniers, Rouhier médecin à Saint-Maixent le sont pour avoir des idées socialistes.
  • - On citera aussi Durand Claude (1801-1895). Propriétaire vigneron à Mauzé dont il est le maire du 1er mars au 10 avril 1848.
Il est l'un des rédacteurs de « L'œil du Peuple ». En 1848, il compose   le « Chant des Vignerons » (5) chant révolutionnaire dans lequel
Il exprime ses convictions républicaines et sociales. Il est condamné à l'exil à Jersey par la commission mixte.
Il est de ceux qui accueille Victor Hugo le 5 avril 1852.
Il revient à Mauzé en 1856. Jusqu'à sa mort, celui qu'on surnomme « le Père Durand », restera fidèle à ses convictions politiques.
(5) Voici un couplet du chant :
« Pauvre ouvrier, tu construis pour ton maître
De beaux châteaux, de somptueux palais ;
Tu fais aussi des prisons pour te mettre
Car tu sais bien : les gros n’y vont jamais... »

Conclusion

Ces opposants au coup d'état du 2 décembre 1851 sont souvent des notables urbains, membres de professions libérales :

- Magistrats, avocats, médecins, mais aussi des journalistes particulièrement politisés.
On relève peu d'artisans et d'ouvriers. Le monde rural est peu représenté si ce n'est par un vigneron et un meunier.
Bien que graciées, ces personnes restent étroitement surveillées jusqu'à la chute du Second Empire et la proclamation de la République le 4 septembre 1870.
Certains feront même alors une brillante carrière politique comme  :
- Joseph Maichain, maire de Niort du 8 décembre 1871 au 25 septembre 1876,
- Amable Ricard qui après le 4 septembre 1870 fut successivement : Préfet des Deux-Sèvres, député, ministre de l'intérieur et sénateur.
Enfin, la Troisième République (1870-1940) accorde des pensions aux proscrits de 1852 ou à leur veuve ou à leurs héritiers.

Sources

  • Archives départementales des Deux-Sèvres : 4M 182, 4M 232 à 237.
  • Journaux : L'œil du peuple 1848-1851, Le Mémorial des Deux-Sèvres 1851 et 1852.
  • Rémy Cazal : « Les proscrit de 1852 »
  • Jean-Claude Faucher : « Amable Ricard », mémoire de la société historique des Deux-Sèvres 2021
  • Rosélia Rousseil : «  Fille d'un proscrit » (voir wiki niort).
  • Le Maitron « Dictionnaire biographique, mouvement ouvrier, mouvement social ».
  • Texte : Maurice Vinck
  • Mise en page : Jean-Michel Dallet
  • Hier Sainte-Pezenne Novembre 2022.