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Rosière de Niort en 1807

De WikiNiort

Origine des Rosières

Si en 2024, on parle encore de rosières, on le doit à Charles Benjamin Chameau né en 1749 et décédé en 1816.
Celui-ci, originaire de la Mothe-Saint-Héray donne une partie de sa fortune et fonde l'Établissement des Rosières en sa commune.
En 2023, la Mothe-Saint-Héray a marié sa 377e Rosière cela montre que cette tradition date du XVIIe siècle…
Si la ville de Niort n’a pas gardé cette tradition, on peut toutefois en narrer un exemple qui se déroula dans cette ville en 1807.

Préambule

Cette petite histoire met en scène deux modestes niortais : Madeleine Assailly, fille de confiance et Louis Eperon, charpentier.

En 1807, Napoléon est au sommet de sa gloire, une cérémonie officielle va servir de prétexte à l’organisation et la reconnaissance du mariage qui va unir nos deux jeunes niortais.
Cette cérémonie, à la fois sacrée et profane, ne changera pas la vie de nos deux niortais, à part peut-être la dot allouée par le conseil municipal.
Cet événement a pu se tenir après le concordat du 15 juillet 1801.

Cette cérémonie de mariage va permettre, à la municipalité et à l'évêque, de célébrer la fête du 6 décembre, c'est-à-dire la victoire d’Austerlitz et l'anniversaire du couronnement de l'Empereur.

Louis Eperon ou Epron rejoint la Grande Armée napoléonienne

Dans une modeste maison, rue Torse (Aujourd’hui rue Taury), deux femmes, la mère et la fille, pleurent amèrement dans cet humble réduit.
La mère est veuve, son époux Louis Assailly, journalier, est décédé en 1793.
En 1802, leur fille, Marie-Madeleine Assailly née le 1er juillet 1779, a 23 ans.
Elle est de famille très modeste, mais elle a la richesse de la beauté, de la bonne conduite et du dévouement...
Marie-Madeleine aime Louis Eperon, ami d’enfance, jeune ouvrier niortais, ce jeune homme est plein de cœur et d'amour pour cette jeune fille.
Mais ce jeune homme, qui était l’espoir des deux femmes seules, allait être soldat.
Le matin même, il était venu faire ses adieux, adieux bien déchirants qui après son départ, allaient laisser une affreuse tristesse au logis.
En 1802, Louis Eperon, né le 17 mars 1784, âgé de 18 ans, allait rejoindre le général Napoléon Bonaparte.

Dialogues imaginés

La douleur de la jeune fille voyant son fiancé partir à la guerre est poignante, ses belles mains se tordent, ses cheveux tombent en désordre sur son visage contracté, ses yeux sont éteints et le découragement la brise.
Sa mère laisse de temps en temps tomber quelques paroles de consolation...
  • Dialogue entre la mère et la fille :
« -Espère, et prie, Madeleine ; Dieu n'abandonne jamais celui qui implore sa protection, murmure-t-elle.
- Hélas ! répond Madeleine, il ne reviendra pas.
- D'autres sont bien revenus, ma fille.
- Je le sens, reprenait l’affligée, je ne le verrai plus jamais. . . Jamais.
- Il reviendra, Madeleine, quelque chose me le dit.
- C’est un faux pressentiment, ma mère. »
  • Dialogue entre Madeleine et Louis :
« - Ô mon bien-aimé Louis, dans ces temps de guerre, il est bien difficile de promettre qu'on épousera sa fiancée.
- Dieu et l’amour me protégeront, Madeleine ; garde moi ta foi et je me battrai contre les ennemis de la France avec la sainte croyance que la mort ne pourra atteindre homme choisi par toi.
- Que Dieu t’entende, Louis, et que ton dévouement te porte bonheur. Tu pars pour ton frère, ton action est belle... mais ma douleur est grande.
- Ma conduite est naturelle, Madeleine ; mon père est âgé. Je ne suis qu'un ouvrier inhabile, et mon rêve, que la conscription réclame, par son travail et son adresse fait vivre notre pauvre famille.
- Il est donc nécessaire que je parte pour mon frère.
- Je n'ai que dix-huit ans et comme toi ; nous sommes bien jeunes.
- À mon retour, plus expérimenté et peut-être, soldat heureux, je te promets la même affection qu'au départ.
- Tu agis noblement, Louis pars, et que le ciel te protège. »

La séparation

Ces deux enfants du peuple, tous deux bons, généreux, et si bien faits pour se comprendre, échangèrent le baiser des fiançailles et se séparèrent.
On était en 1802, au commencement de ce siècle que Napoléon devait faire si grand.
Louis Eperon, le charpentier, car tels étaient son nom et sa profession rejoignit son drapeau victorieux.
Madeleine Assailly fut femme de confiance chez Mme Veuve Pastour de Neuville.
Dessin : Soldats de Napoléon.

Retour de la guerre de Louis Epron

En 1807, Louis Epron, riche de ses succès mais aussi d'une blessure reçu à la Bataille de Caldiero *, qui lui donnera une pension à vie, est de retour.
Il servit cinq ans dans Ia 79e de ligne, et après bien des combats, bien des misères, après avoir parcouru de nombreux pays en vainqueur, notre héros, toujours fidèle à ses amours et toujours attendu par Madeleine, revint à Niort.
Cette blessure lui valut une pension, des témoignages honorables de la part de ses chefs et de ses camarades et son retour au pays.
En voyant le pauvre blessé, Madeleine, dont les sentiments étaient si élevés, sentit son amour grandir encore.
- « Cher Louis, lui disait-elle, tu nous es rendu enfin ; ton corps garde les marques de ton courage ; tu es revenu fidèle, le bonheur enfin pourra nous sourire. »
Et le brave soldat retrouvant Madeleine plus jolie, se trouvait bien récompensé de son dévouement et de sa constance.
Nous ne parlerons point ici de la mémorable bataille d'Austerlitz en 1805, l'une des plus belles pages de l’épopée napoléonienne...
Le 3 décembre 1805, Napoléon dictait sa fameuse proclamation à la Grande Armée :
- « Soldats, je suis content de vous... Vous avez décoré vos aigles d’une immortelle gloire... Mon peuple vous reverra avec joie, et il vous suffira de dire : j’étais à la bataille d’Austerlitz pour que l’on vous réponde : Voilà un brave ! »

* Bataille de Caldiero

Louis Epron fut blessé lors de la Bataille de Caldiero.

Cette bataille se déroula dans Caldiero, ville située dans le nord de l’Italie.
Elle opposa, le 30 octobre 1805, les troupes françaises du maréchal André Masséna et les troupes autrichiennes de l'archiduc Charles-Louis d'Autriche-Teschen.
  • Récit de la bataille de Caldiero extrait de la correspondance du Colonel Roch Godart (1761-1834), du 79e :
- « Le lendemain, 8 brumaire (du 30 octobre 1805), le maréchal André Masséna qui nous commandait fit placer trois divisions en ordre de bataille, en attendant les rapports de nos deux autres divisions qui manœuvraient sur nos flancs et sur ceux de l'ennemi.
Le prince Charles, l’autrichien, nous fit aussitôt attaquer de front ; nos divisions du centre furent repoussées. Celle dont je faisais partie (division Molitor) tenant la gauche, reçut l'ordre de se porter en avant.
Je commençais mon mouvement avec mes quatorze compagnies de fusiliers, faisant face au flanc droit d'une colonne de 4000 à 5000 hommes qui marchait sur la grande route pour soutenir ses tirailleurs ; arrivé à 150 pas de cette colonne, je fis faire une décharge de mousqueterie et fis ensuite foncer dessus à la baïonnette et au pas de charge.
Jamais déroute ne fut plus complète ; je fis près de 1200 prisonniers dont une quarantaine d'officiers.
La retraite de cette colonne autrichienne, dont j'avais réussi à prendre tant de prisonniers, celle du régiment de hussards qui venait à son secours, changèrent entièrement la face des choses.
Nos divisions, qui déjà étaient elles-mêmes en retraite, revinrent à la charge et nous repoussâmes l'ennemi jusque dans ses retranchements de Caldiero ; nous l'y maintiennes et nous restâmes maitres du champ de bataille.
Je perdis dans cette journée 127 sous-officiers et soldats tués ou blessés, plusieurs officiers blessés grièvement et presque tous généralement furent ou touchés légèrement ou eurent leurs habits criblés de balles. Pour ma part, j'eus mon chapeau percé d'un biscaïen et trois balles percèrent mes habits, très heureux d'en être quitte à si bon marché. »
Le préfet Claude Dupin (Geste Éditions).

Mariage de Louis Epron avec Madeleine Assailly

Reprenant le journal de 1859 qui nous guide dans notre narration, nous lisons ces mots :

« Le 28 novembre 1807, les citoyens de Niort se disposent a célébrer la fête du 6 décembre, c'est-à-dire la victoire d’Austerlitz et anniversaire du couronnement de l'Empereur, avec "pompe et hilarité".
Déjà la Rosière impériale est connue, déjà les ordonnateurs de la fête sont nommés et tout nous assure qu'ils ne tromperont point les espérances de leurs concitoyens. »
  • Sur l’acte de mariage est noté :
"Aujourd’huy sixième jour du mois de décembre 1807, jour de l’anniversaire du Couronnement de sa Majesté l’empereur et Roy, en la victoire d’Austerlitz ..."
En 1807, la mairie de Niort avait quitté le Pilori depuis juillet 1792 et s’était installée dans l’ancien logement du gouverneur au Donjon.
Ainsi, le 6 décembre 1807, une jolie Rosière Madeleine Assailly fut mariée son ami d'enfance Louis Eperon, au milieu d'une fête pompeuse, ayant pour témoins le préfet Claude Dupin et trois des principaux habitants de la ville dont Marc-Antoine Busseau adjoint au Maire.
Après la célébration du mariage, M. le préfet délivra aux nouveaux époux le montant de la dot qui avait été votée par le conseil municipal et fixé à la somme de mille francs.
Ce jour-là, Mgr Dominique Dufour de Pradt (1759-1837), Évêque de Poitiers de 1804 à 1809 officia à Notre-Dame la cérémonie par la bénédiction du mariage.
C’est ainsi que, suivant les ordres d’un empereur, assisté d’un préfet et bénie par un évêque, la pauvre fille de la veuve fut unie pour sa vertu à un soldat rempli de dévouement.
Dessin 1839 Notre-Dame de Niort.

Suite et fin de l’histoire

De cette union, vont naître 6 enfants :
Louis-Jean né en 1808, René en 1909, Louise en 1811, Marie-Madeleine en 1813, Marie en 1814 et Charles-Napoléon.
Ce dernier enfant au prénom destiné qui rappelant les heures de gloire et de peine de son père, décédait, âgé de 5 ans en 1825.
Sur les différents actes d’état civil, les parents déclarent ne savoir signer.
Marie-Madeleine décède le 10 mai 1850, âgée de 71 ans, rue du Frêne.
Louis Eperon ou Epron fut, comme sa famille de profession charpentier, il décède le 26 février 1868, âgé de 84 ans au 50, rue du Frêne à Niort.

Sources

  • Archives 79.
  • 79e de ligne.
  • Sur les routes d'Europe avec Napoléon : histoires de grognards (Laurent Delenne (Auteur) )
  • Divers Wikipédia.
  • Mémorial des Deux-Sèvres 1859.
  • Texte, illustrations et mise en ligne : Jean-Michel Dallet.